Romain Cervello est expert mobilier objets d’art au Bureau Polyexpert de Perpignan. Comme il aime partager ses connaissances en histoire de l’art, il nous fait découvrir le Galuchat : un cuir moins connu que la vachette ou le croco mais utilisé depuis des siècles dans l’ameublement, les objets d’art, et, la bijouterie. 👇

Une matière unique

Nom mystérieux pour les uns, merveille pour les autres, l’art du galuchat étonne. Matériau issu de la peau de certains poissons, raies et requins, consommés avant tout pour leur chair, le galuchat à petits grains provient de la roussette, du chien de mer ou encore du requin du Groënland tandis que, celui à gros grains provient de la raie pastenague.

Étant donné la texture microscopique de ses fibres qui sont croisées (comme un tissu), au lieu d’être parallèles comme sur tout autre cuir traditionnel, il est, par exemple, vingt fois plus résistant que le cuir de vachette. Son relief particulier est aussi reconnaissable avec ses perles blanches que l’on nomme « couronne ». (Visuel n° 1)

Une origine séculaire 

La connaissance de l’utilisation du galuchat remonte au Japon, au VIII^e siècle, où « brut », il servait à créer des articles de gainerie tels boîtes, gardes de katana, fourreaux… 

Les marchands portugais, anglais, hollandais établis au Japon, aux Indes et en Indonésie importèrent ces peaux en Europe dès le XVI^e siècle. Les tanneurs anglais développent ensuite des compétences et ustensiles nécessaires pour assouplir et transformer ces peaux en cuir. A Paris, Jean-Claude Galluchat, artisan sur l’île de la Cité, déniche ce matériau inédit et fascinant. Il le modèle et réalise des créations raffinées dont la Marquise de Pompadour, favorite de Louis XV, aurait été une acheteuse compulsive. Au milieu du XVIII^e siècle, le nom Galluchat fut déformé par inadvertance

Une évolution moderne

Le travail de cette matière a transcendé des siècles d’artisanat pour se développer sur bien des créations éclectiques : poignée de parapluie, objets de vitrine (étuis à cire, de couture …), mobilier, et nombre d’autres.(Visuels n° 2 et n° 3).

Une des réalisations les plus spectaculaires utilisant le galuchat, associé à d’autres matériaux, est une commode de la période Art déco par Paul Iribarne-Garay dit Iribe. Quand elle ne trouve pas place dans un musée (Les Arts Décoratifs, Paris, vers 1912, visuel n° 4), les rares exemplaires qui passent en ventes publiques atteignent des sommets : 400 000 € hors frais de vente chez Christie’s le 08/06/2006.

De nos jours, le galuchat est utilisé pour fabriquer des sacs, des bracelets de montre, des carnets, des coffrets… Certaines réalisations font écho aux créations anciennes, piquent la curiosité des néophytes et passionnent toujours autant les initiés.

Romain Cervello,
Expert vol, Polyexpert Perpignan

Bio express de Romain Cervello

• Formation : Licence d’histoire de l’art et Master 2 marché de l’art.
• Expérience : Assistant de département mobilier et sculptures XVIIIe et XIXe puis clerc de commissaire-priseur en maisons de ventes aux enchères.
• Entrée dans le Groupe : mai 2019.
• Spécialité : vol.
• A titre personnel, goût pour : les voyages, le design, le volley.