Les incendies se déclarant dans les parkings souterrains impliquent des véhicules en plus du bâtiment. Plusieurs compétences doivent être mises en œuvre pour la gestion du sinistre par les différents acteurs. Un travail d’équipe est alors nécessaire. Elle devra se composer d’un expert automobile, d’un expert bâtiment, d’un expert en recherche des causes et des circonstances incendie et explosion, et d’un expert en pertes d’exploitation. Avec discipline, méthode et votre œil d’expert, faites gagner votre mandant????

Contexte

De nombreux incendies de parking se déclarent chaque année. Ils sont souvent impressionnants et coûteux pour les assureurs. Ils engendrent de conséquents dommages immobiliers, affectent parfois un nombre important de véhicules et peuvent entraîner de substantielles pertes d’exploitation.

Sinistres médiatisés

• Le parking de la place Vendôme à Paris en mars 2012.
• Le parking souterrain Edouard VII à Paris en octobre 2014.
• Le parking des Salinières à Bordeaux en mai 2019.
• Le parking des Martyrs à Luxembourg en septembre 2019.
• Le parking privé, rue des Chartrons à Bordeaux en novembre 2020.

Causes possibles d’incendie
Elles sont multiples. On constate les incendies d’origine :

• Volontaire ou criminelle (plus de 60%).
• Accidentelle liée à l’environnement direct du véhicule.
• Accidentelle engendrée par une défaillance d’un organe interne du véhicule.
• Accidentelle créée à la suite à un dysfonctionnement de l’installation électrique du bâtiment…

Spécificités

Les incendies de parking appellent de nombreuses compétences partagées entre les experts bâtiment, les experts automobile, les experts pertes d’exploitation et les experts RCCI (Recherche des causes et circonstances incendie).

La convention concernant l’expertise amiable contradictoire, mise à jour par circulaire n°1/2022 du 01/02/2022, énonce dans l’article 8 les dispositions particulières concernant l’expertise d’un sinistre incendie endommageant un bâtiment en présence d’un ou plusieurs véhicules terrestres à moteur. Elle organise, en pareilles circonstances, les interventions concomitantes de l’expert bâtiment et de l’expert automobile afin de gagner en efficacité. Un procès-verbal spécifique relatif aux causes et circonstances est établi.

Approches méthodologiques

Sur site, les experts recueillent les informations nécessaires à la compréhension du sinistre.
Un travail d’équipe doit être mis en place.
L’expert automobile vérifie tout d’abord le numéro de série du véhicule pour l’identifier, et se procure une copie de la carte grise, des justificatifs d’entretien et travaux, du contrôle technique si besoin. Il auditionne également le propriétaire du véhicule (fonctionnement et utilisation, l’heure et le jour du stationnement).

L’expert bâtiment rassemble de son côté les témoignages, les informations sur la construction du bâtiment, les documents nécessaires pour justifier le bon fonctionnement des installations électriques et de sécurité incendie. Il vérifie la conformité du risque au contrat, l’autorisation d’exploitation du parking et le respect des exigences règlementaires en fonction de la date de construction de l’ouvrage. Il demande les plans du parking, localise les systèmes de ventilation pour comprendre le cheminement des fumées. Il établit ensuite la liste des moyens de détection et d’extinction présents. Il réalise le bilan des dommages et procède à leur évaluation.

Les informations collectées par les experts automobile et bâtiment sont communiquées à l’expert en recherche des causes et des circonstances incendie (RCCI). Ce dernier vérifie puis complète en fonction de ses constats le recueil de données.  

L’expert RCCI fait tout d’abord une analyse globale du parking et de son contenu en interprétant les traces laissées par les flammes sur les véhicules et le bâtiment. Il détermine ensuite la ou les zones d’éclosion de feu, avant d’investiguer sur la cause de l’incendie.

A ce stade des investigations, des hypothèses sont étudiées.
L’incendie a éclos sur un ou des véhicules.
Si la cause semble être d’origine volontaire, un ou des prélèvements de débris incendie sont réalisés pour démontrer l’apport d’accélérant. Les débris de verre des véhicules sont analysés pour déterminer le type d’impact (thermique ou mécanique).
Si la cause est intrinsèque au véhicule, des mises en cause du constructeur et des garages sont envisagées.

L’incendie est externe aux véhicules
Dans ce cas, une analyse fine de l’environnement et du bâtiment est réalisée pour comprendre les circonstances de l’événement (travail par point chaud, dysfonctionnement de l’installation électrique du bâtiment, biens stockés dans l’environnement des véhicules, etc.). Des mesures conservatoires sont prises à l’issue de ces premiers constats afin de préserver les preuves techniques.

Et du côté des responsabilités 

La loi Badinter institue un régime sévère pour le(s) propriétaire(s) de véhicule(s) impliqué(s). La jurisprudence favorise la situation des victimes par rapport à celle des propriétaires de véhicules.

Comment s’en sortir ?

• Démontrer que le feu n’est pas parti du véhicule.
• Démontrer le caractère criminel (la loi Badinter ne s’appliquant qu’en cas d’accident).
• Relever que le véhicule est stationné dans un endroit impropre à la circulation (Ex : scooter dans une cage d’escalier).
• Démontrer que l’incendie provient d’un élément étranger à la fonction de circulation du véhicule stationné et est en relation avec une fonction outil.

L’enjeu attaché à la recherche de la cause est primordial et ce d’autant que si le feu prend dans un véhicule de façon accidentelle et se communique à des voitures voisines, tous les assureurs des véhicules « impliqués » sont solidairement responsables.

Eugénie Mathis
Polyexpert Hauts de France Centre – Courbevoie

Bio express d’Eugénie Mathis

• Formation : Diplôme d’ingénieur INSA Toulouse en procédés industriels.
• Diplôme certificat technique INSSI et CFPA Europe Fire safety.
• Expériences : expertise après sinistre en recherche des causes et circonstances Incendie et Explosion depuis 20 ans environ, et, ingénierie des procédés industriels en prévention/ protection incendie et explosion.
• Entrée dans le Groupe : septembre 2021.
• Spécialité : Expert en Recherche de Cause Incendie et Explosion (RCCI).
• A titre personnel goût prononcé pour : les sciences et les nouvelles technologies.